lundi 18 janvier 2010

La mutuelle Vittavi vit sa vie en sursis

Source : ToulEco.fr
Huit ans après les turbulences qui avaient secoué la Smeso et la mise en examen de son ancien directeur, Christian Fardou, pour « abus de confiance, abus de biens sociaux et escroquerie », la mutuelle étudiante toulousaine, rebaptisée Vittavi en 2003, connaît une nouvelle période de trouble. En cessation de paiement avec à son compteur 2 millions d’euros de perte en 2009, elle a été placée en octobre sous l’administration provisoire par l’Acam, Autorité de contrôle des assurances et mutuelles.

Huit ans seulement après avoir défrayé la chronique, l’ancienne Smeso, aujourd’hui Vittavi, fait de nouveau parler d’elle. On se souvient que la mutuelle étudiante toulousaine avait fait l’objet en 2000, pour ses dysfonctionnements, d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales et d’une enquête de la division financière de la police judiciaire. Et que son ancien dirigeant, Christian Fardou, mis en examen en 2002 pour « abus de confiance, abus de biens sociaux et escroquerie » a finalement été condamné en appel en janvier 2007 à quatre ans de prison dont trois avec sursis, interdiction de gérer une entreprise pendant cinq ans, privation des droits civiques pour la même durée de cinq ans et surtout à une amende de 100.000 euros.

Alors que ce lourd passif pèse encore sur les mémoires des salariés, un nouveau coup de projecteur vient mettre en lumière des problèmes de gestion et des choix stratégiques contestables au sein de la mutuelle. L’affaire remonte à octobre 2008, date de création du Groupe Vittavi Mutualité, né de l’union technique de Vittavi et de la mutuelle généraliste Landes Mutualité. Objectif affiché de ce nouvel ensemble présent sur Midi-Pyrénées, l’Aquitaine et le Limousin avec 27 agences, 170 salariés, 190.000 adhérents et 55 millions d’euros de chiffre d’affaires : atteindre 400.000 adhérents à 5 ans et 100 millions d’euros de CA.

Deux millions d’euros de perte
En un an, la nouvelle entité a connu un fort développement avec l’ouverture de nouvelles agences, notamment rue des Lois à Toulouse, sous la marque commune Génération Mutuelles. Mais ses ambitions se sont vite écroulées...

En cessation de paiement avec deux millions d’euros de pertes financières en 2009, Vittavi a été placée sous la tutelle de l’Acam en octobre dernier. Et il s’avère qu’un mois plus tard, en novembre, l’Autorité de contrôle des assurances et mutuelles, a nommé le même administrateur provisoire pour le Groupe Vittavi Mutualité. L’Acam estime en effet que l’union GVM pourrait être « en état de cessation des paiements fin 2009-début 2010 » du fait des problèmes financiers de Vittavi. Landes Mutualité ayant délégué sa gestion à l’union GVM, elle devrait aussi, selon nos informations, être placée sous administration provisoire.

« Vittavi était déjà mal en point en octobre 2008. L’union technique avec Landes Mutualité et ses 37 millions de trésorerie l’ont sauvée. Par le biais du groupe, Vittavi a bénéficié de l’expertise, des compétences et des moyens de son partenaire qui lui, a pu rajeunir son portefeuille. Pour la première fois depuis longtemps, Vittavi recommençait à gagner des parts de marché. Et voilà où nous en sommes. On ne sait même pas comment les salaires de février vont être payés », témoigne un salarié du Groupe Vittavi Mutualité.

Des aberrations de gestion
Développement hasardeux dans les Dom-Tom où selon des salariés, les dirigeants de « passaient plus de temps qu’en France », aberrations de gestion, manque d’anticipation… Des membres du personnel évoquent la gestion « catastrophique » de Vittavi, ce que semble confirmer l’ancien président de Landes Mutualité sur le site de l’Argus de l’assurance, qui dénonce les notes de frais « faramineuses » émises par Vittavi, notamment pour « des voyages dans les Dom-Tom justifiées par l’ouverture d’agences dont certaines ne comptaient pas plus de dix adhérents ».

Mais étonnamment, Eric Gautier, ancien directeur de Vittavi démis de ses fonctions dès la mise sous administration provisoire de la mutuelle par l’Acam, se retrouve aujourd’hui directeur général par interim de GVM à la place de Jacques Marsant, ex-DG du groupe et de Landes Mutualité. « Il a des appuis c’est certain mais à quel niveau ? », s’interroge un salarié à propos du jeune dirigeant, membre du Conseil national du Modem.

Fin du bail en juin
« Pourquoi Myriade, une mutuelle concurrente de Landes Mutualité, a-t-elle accordé en décembre un prêt d’1,5 millions d’euros à Vittavi ? Il y aurait aussi des négociations avec Sud-Ouest Mutualité et Apicil alors que l’offre de Reunica, de loin la plus satisfaisante, a été écartée… On est en train de sauver Vittavi en cessation de paiement et de déshabiller Landes Mutualité qui est en bonne santé financière ! Par ailleurs, le bail du siège social de Vittavi a été donné et arrive à son terme en juin. On devra donc déménager », s’inquiète ce salarié qui, comme beaucoup de ses collègues, se demande « à quelle sauce il va être mangé ».

Contactée à plusieurs reprises pour commenter ces informations, la direction de Vittavi et du Groupe Vittavi Mutualité n’a pas donné suite à nos appels. De son côté, l’Acam précise « ne pas communiquer sur le dossier ».

Johanna Decorse, ToulEco.